L’Enfant de la marée, Tome 1 : Les vaisseaux d’os, RJ Barker

Les vaisseaux d’os (2025, Leha)

Auteur : RJ Barker, Britannique

Tome 1/3 de la trilogie de l’Enfant de la marée, Fantasy d’aventures

Illustration : Edward Bettison

Traduction : Hermine Hémon et Erwan Devos

The Tide Child, book 1: The Bone Ships (2019)

Depuis des générations, les Cent Îles et les Iles Décharnées construisent leurs navires à partir d’ossements de dragons des mers et les ont chassés jusqu’à l’extinction. Si les dragons ont disparu, les tensions entre les deux nations autour de cette précieuse ressource ne se sont jamais apaisées.

Joron Bitord a été condamné à commander un vaisseau des morts, ces navires peints en noir dont l’équipage ne compte que des repris de justice, voués à semer la terreur et le chaos sur les mers des Cent Îles et des Îles Décharnées et à périr sur les flots.

Mais il n’a ni le respect de son équipage ni l’étoffe d’un meneur et se noie dans l’alcool, laissant péricliter son navire. Pourtant, son destin prend une tournure inattendue quand Meas la chanceuse lui ravit le commandement de l’Enfant de la marée en combat singulier.

Cette femme dure et sans pitié est animée par une mission secrète qui non seulement donnera une raison de vivre à l’équipage de parias sous ses ordres, mais les fera aussi entrer dans la légende.

Avant toute chose, je tiens à remercier les éditions Leha pour leur confiance et l’envoi de ce SP numérique.

Mon avis

Joron Bitord, notre prota du jour, n’est pas franchement fringant. Il est pourtant l’épouse de bord de l’Enfant de la marée, un vaisseau composé d’os de dragons, rien que ça, et de tout l’équipage qui vient avec. Sauf qu’il s’agit d’une condamnation sociale, voire d’une condamnation à mort, puisque seuls les pires criminels, les rejetés de la société, sont voués à servir sur ces vaisseaux noirs, et ils ne gagneront leur rédemption qu’à l’occasion d’un exploit, exploit si formidable qu’il ne pourra conduire qu’à leur mort.

Et Joron, il est pas trop jouasse d’être l’épouse d’un tel vaisseau, son avenir s’est terminé avant d’avoir commencé, et tout son équipage le méprise. Seulement, Meas la chanceuse, noble déchue condamnée à servir sur le même vaisseau noir, entend bien bousculer tout ce petit monde puisqu’elle est dépositaire d’une impossible mission secrète. Et c’est pas un équipage récalcitrant de bras cassés (presque littéralement) qui va l’empêcher d’arriver à ses fins.

Au passage, mention spéciale à l’équipage, qui est assez moderne dans sa diversité (on va y revenir un peu), et les termes spécifiques ont été personnalisés à l’univers (les voiles du vaisseau d’os sont des ailes, le vaisseau étant masculin le capitaine est une épouse de bord quel que soit son genre, etc.) . C’est de l’ordre du détail, mais c’est plutôt cool.

Ce premier tome est avant tout un récit d’aventures qui se rapproche un peu des histoires de pirates. L’intrigue est plutôt simple et classique – un équipage mal assorti de gens au fond du trou qui vont devoir faire équipe pour un objectif bien plus grand qu’eux – mais elle fonctionne. J’ai beaucoup aimé voir ces personnages évoluer au contact de Meas : retrouvant leur confiance, leur dignité, nouant de vrais liens avec leurs camarades de pont. Meas elle-même n’offre que peu de perspectives d’évolution et donc d’intérêt, puisqu’elle est déjà « parfaite », mais je la vois essentiellement comme un catalyseur pour les autres personnages, en particulier pour Joron, qui lui pour le coup, démarre de très bas.

Joron est d’ailleurs un personnage que j’ai beaucoup aimé. Complètement déprimé en début de tome, c’est à peine s’il voit l’intérêt d’essayer. Il se révèle très attachant, j’ai beaucoup aimé sa relation avec certains des autres personnages, en particulier le Gullaime, l’un des personnages les plus fascinants du livre, sorte d’oiseau humanoïde considéré comme un enfant de la déesse oiselle, mais dont l’espèce est mutilée et réduite en esclavage en raison de ses pouvoirs liés au vent.

D’ailleurs, c’est un autre aspect que j’ai trouvé très intéressant, c’est que ce monde est profondément injuste, se faisant par moments le miroir de problématiques bien réelles. Les dragons de mer ont été exterminés pour que leurs os servent à la construction de vaisseaux, les Gullaimes sont réduits en esclavage sur ces mêmes vaisseaux, et il y a une tradition assez glauque que je vous laisserai le « plaisir » de découvrir. Pour ne rien arranger, le système favorise la force et la perfection. Attention, hein, pas la force viriliste masculine, mais la force reproductrice féminine, ce qui n’est pas franchement moins toxique. Pour s’élever dans la société, il faut faire des enfants. Plein d’enfants. Mais pour ça, il faut qu’ils soient parfaits (pas de handicaps, pas de taches sur la peau etc) et il ne faut pas non plus mourir en couche, sinon vous faite descendre le rang social de toute votre lignée.

Cette société est ainsi inégalitaire, injuste, et fondamentalement validiste, puisque toute personne handicapée sera littéralement rejetée au bas de l’échelle sociale, et ne pourra accéder à aucun travail prestigieux ( en plus, c’est au sens très large, comme je le disais, une tache sur la peau peut suffire à vous exclure, et vos descendants avec).

Ce n’est donc pas étonnant que l’Enfant de la marée accueille sur son pont autant de personnages handicapés et/ou heurtés par la vie, quel que soit leur genre. Bon, cette représentation est plus esthétique qu’autre chose puisque leurs handicaps ont très peu d’impact sur la narration ou leur écriture, mais c’est pas souvent qu’on voit cette problématique réellement au cœur de l’univers proposé, donc perso, j’ai trouvé ça intéressant et je me demande si ce sera toujours exploité dans les suites.

Pour finir, j’ai trouvé qu’il y avait un vrai sense of wonder sur certaines scènes, même si je ne peux pas en dire plus pour ne pas spoiler. Mais ça m’a donné envie d’enfiler mon plus beau gilet de sauvetage et de monter sur un bateau alors que… je suis pas franchement à l’aise avec l’eau.

Bilan

Ce premier tome propose une intrigue certes simple et classique, mais je l’ai trouvé paradoxalement rafraichissant. Il donne la part belle aux rejetés du système et surtout, à l’aventure, fendant les flots en compagnie de personnages attachants dont j’ai hâte de connaître l’évolution, aux côtés de créatures aussi fascinantes que redoutables. En ce qui me concerne, j’en redemande déjà !

Et ailleurs, qu’en pense-t-on ?

Je vais pas aller très loin si je dois faire un vaisseau avec ce dragon des mers… On va rester sur la lecture, ce sera plus sûr.

9 réflexions sur “L’Enfant de la marée, Tome 1 : Les vaisseaux d’os, RJ Barker

  1. Pingback: The bone ships – R.J. Barker – Le culte d'Apophis

  2. Pingback: Les Symphonews inachevées – Aout 2025 | L'Imaginaerum de Symphonie

  3. Pingback: Les vaisseaux d’os (L’enfant de la marée ♯1) de R. J. Barker – Les Blablas de Tachan

Répondre à tampopo24 Annuler la réponse.