La route de la conquête, Lionel Davoust

Livre La Route de la Conquête posé à côté d'un Dragon orange au crochet.

La route de la conquête

Auteur : Lionel Davoust, Français

2014, (Science) Fantasy

Ed. Critic, recueil de 6 nouvelles

Illustration : François Baranger

Warnings

En son cœur, en son âme, l’espèce humaine est déséquilibrée. Nous apportons l’équilibre, la durée, la stabilité. C’est juste, et indispensable. C’est notre mission. Mais… que se passe-t-il quand on rencontre un peuple déjà équilibré?
On la surnomme la Faucheuse. Débarquée trente ans plus tôt dans le sud, la généralissime Stannir Korvosa assimile méthodiquement nations et tribus au sein de l’Empire d’Asreth, par la force si nécessaire. Rien ne semble résister à l’avancée de cette stratège froide et détachée, épaulée par des machines de guerre magiques.
Parvenue à l’ultime étape de sa route, elle est confrontée à un nouveau continent – un océan de verdure où vivent des nomades qui ne comprennent pas les notions de frontières ou de souveraineté. Elle doit pourtant affirmer l’autorité impériale car, dans le sous-sol de la steppe, se trouvent des ressources indispensables pour Asreth. Mais après une vie de conquête, Korvosa pourrait bien rencontrer la plus grande magie qui soit… et affronter un adversaire inédit : le pacifisme.

Merci beaucoup à Lionel Davoust pour son envoi et sa dédicace suite à notre rencontre au salon ImaJn’ère 😀

Mon avis global

Je poursuis mon voyage dans l’univers d’Evanégyre, dans le désordre vu que j’ai lu le cycle principal en premier^^ Ce qui intéressant avec un recueil de nouvelles qui s’inscrit dans un univers plus vaste, c’est que ça permet d’explorer des idées ou des évènements complémentaires, mais qu’il serait difficile d’exploiter dans un format plus long. Il n’est par ailleurs pas obligatoire de les lire pour comprendre le cycle, mais elles apportent de nouveaux éclairages.

Ce recueil comporte six nouvelles de différentes longueurs (dont deux inédites), toutes différentes les unes les autres dans leurs intrigues ou leurs points de vue, même si on observe une certaine toile de fond dans les thématiques, la mémoire et les différences culturelles revenant à plusieurs reprises. La vision proposée de l’Empire est également très intéressante et ambiguë, avec des gens persuadés en toute sincérité d’agir pour le bien de tous, mais qui s’interrogent sur les moyens mis en œuvre pour atteindre cet objectif, et nous mêmes nous demandant si cette assurance est véritable ou s’ils ont été trompés, d’autant que l’on assiste surtout aux conséquences néfastes de cette expansion, à la fois pour les peuples que l’Empire conquiert ou pour ses propres soldats.

Malgré leur format, elles se révèlent souvent complexes, loin de tout manichéisme, toujours sensibles et humaines, tout en donnant envie de plonger toujours davantage dans cet univers.

Mon avis sur chaque nouvelle

La route de la conquête

Dans ce récit, le plus long du livre, nous retrouvons un personnage d’arrière plan de La Volonté du Dragon, Korsova, qui a gagné en âge, en sagesse, et en lassitude guerrière. Comme le titre l’indique, il s’agit d’une histoire de conquête, puisque l’Empire d’Asreth est en pleine expansion, pour le « bien de tous » (sauf que ça dépend du point de vue, évidemment, d’autant que si on peu rafler des ressources au passage, hein…), et s’oppose donc à une autre culture, qui ne nous est pas forcément sympathique, mais en même temps, on ne peut que compatir avec ce qui leur arrive. Le texte est ainsi assez ambigu, on ne nous montre pas des conquérants avides de sang, ni à l’inverse une tribu utopique, mais au contraire un heurt des cultures et une volonté de trouver un arrangement sans effusion, avec des personnages profondément humains, remplis de doutes devant leurs convictions ébranlées. L’aide de camp de Korsova, plus jeune et plus proche de ce qu’était la générallissime dans la Volonté, apporte un point de vue supplémentaire à cette situation complexe.

Au-delà des murs

Encore une nouvelle ambiguë que celle-ci, fonctionnant avec Bataille pour un souvenir, plus loin dans le recueil. Ici, on explore une autre facette de la conquête, à savoir le Syndrome de stress post traumatique d’un soldat de l’Empire. Afin qu’il puisse tourner la page et dans le cadre d’une procédure presque judiciaire, son thérapeute l’incite à essayer de comprendre ce qu’il a vécu (au passage, j’aime toujours beaucoup ce mélange de modernité/technologie/science conjugué à la fantasy). Au fil de la nouvelle et de l’exploration des souvenirs du narrateur, on découvre donc ce qu’il s’est passé au cours d’une bataille décisive, et on se prend à douter des vraies motivations du thérapeute. Mais peut-on croire le narrateur ? Est-il paranoïaque à cause du traumatisme ? Essaie-t-il de refouler les horreurs qu’il a vécues ou celles qu’il a perpétrées ? Ou bien essaie-t-on de le manipuler pour d’obtenir quelque chose de lui ? J’apprécie beaucoup que la fin de la nouvelle reste ouverte et qu’elle nous abandonne avec nos propres doutes.

La Fin de l’histoire

On continue sur les mêmes thématiques, puisque cette nouvelle prend en partie la forme d’un journal, puisque le narrateur est chargé de consigner une expédition de l’Empire à la conquête d’un nouveau territoire. Nous découvrons en parallèle le peuple dudit territoire qui, sentant que la fin est proche, s’est réunit pour partager les histoires de vie de chacun. Cette nouvelle est à la fois poétique est très triste

Bataille pour un souvenir

Cette nouvelle fonctionne avec Au-delà des murs, premier texte d’ailleurs qui n’est pas raconté du point de vue de l’Empire, mais d’un des Guerriers-miroir affrontés par le protagoniste d’Au-delà. Nous découvrons alors une culture fascinante, puisque ces fameux guerriers puisent leur force et leur détermination sans failles dans leurs souvenirs (je ne vous en dirai pas plus pour ne pas spoil), un pouvoir qui est à double tranchant comme on finit par le comprendre. Je pense que c’est ma préférée du recueil, et j’ai bien apprécié qu’elle ne nous donne pas la réponse à l’ambiguïté d’Au-delà des murs.

Le guerrier au bord de la glace

Sans doute la nouvelle la plus cinématographique de ce recueil : des méchas et un dragon. Oui, oui. J’avoue que je ne m’y attendais pas (alors que je connaissais l’existence des armures), donc sur le coup je me suis demandé ce que j’étais en train de lire^^ Il faut dire que plusieurs siècles se sont écoulés depuis le début de la conquête, donc fatalement, la technologie a évolué (c’est d’ailleurs très intéressant de voir le même univers évoluer au fil du temps). Mais se contenter d’écrire une baston géante digne d’un shonen (sans jugement, j’adore les mangas), ç’aurait été trop simple, donc la nouvelle part rapidement dans une autre direction, plus sensible et intimiste. Pas ma préférée, mais elle est très chouette. Et elle répond au passage à une question que je me posais depuis longtemps sur l’univers d’Evanégyre, et ça m’a donné envie d’en savoir plus sur cette période de fracture.

Quelques grammes d’oublis sous la neige

Cette nouvelle est un peu à part, puisque c’est la seule à se dérouler après la chute de l’Empire, alors que Wer, dieu bien connu dans Les dieux sauvages, commence à étendre son influence, ce qui n’est pas sans rappeler l’extension du christianisme. Le texte est plus classique, puisqu’il oppose ancienne magie et modernité (alors que l’Empire liait les deux) sorte de conte interne à l’univers dont on ne sait dans quelle mesure il est vrai. Un texte aux thématiques sombres et complexes aussi, entre sexisme, cupidité, amour interdit et secrets du temps.

Et ailleurs, qu’en pense-t-on ?

11 réflexions sur “La route de la conquête, Lionel Davoust

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